En tant qu’éducateurs spécialisés, nous avons choisi cette profession parce que nous croyons en chaque élève, peu importe ses défis. Nous avons choisi de nous engager auprès d’enfants et de jeunes qui ont besoin de soutien et d’accompagnement pour développer leur plein potentiel. Mais parfois, cet engagement est mis à l’épreuve. Ce début d’année, de nombreux collègues partagent leurs histoires, des histoires de violence qui viennent s’immiscer dans leur quotidien et leur rendre la tâche pratiquement insoutenable.
Des classes au bord du chaos
Certains éducateurs se retrouvent dans des classes où le mélange des profils, comme des élèves ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA) avec d’autres ayant de lourds troubles de comportement (TC), génère une dynamique explosive. Coups de poing, morsures, matériel lancé, rapports d’incidents à répétition… Ce sont des situations auxquelles de plus en plus d’entre nous font face, souvent sans le soutien adéquat de nos supérieurs.
Ces situations de violence ne sont pas sans conséquences. L’épuisement est palpable : “Je suis à bout. Je n’ai plus d’énergie, je ne me sens plus disponible même pour mes propres enfants.” Ces mots résonnent chez beaucoup d’entre nous. Le fait de devoir constamment éteindre des feux, sans moments de répit, érode notre énergie et notre passion, au point où se rendre au travail devient une source de stress plutôt qu’une source de satisfaction.
“Tu es émotive dans tes interventions”
La phrase est blessante, car elle sous-entend qu’en tant qu’éducateurs, nous devrions être des robots, ne pas ressentir, ne pas réagir émotionnellement face à la violence que nous vivons. Or, nous sommes humains. Oui, nous sommes “émotifs”, car nous sommes investis. Nous sommes aussi des êtres de cœur, avec des limites qui doivent être respectées. Que nous soyons en classe TSA ou TC, nous nous retrouvons à subir des agressions, des blessures, et à voir nos appels à l’aide ignorés ou minimisés.
La mobilisation de la direction : Une obligation essentielle
Si les éducateurs et enseignants ont le devoir de protéger les élèves et de les accompagner au mieux, la direction a aussi des responsabilités fondamentales envers son personnel. Elle doit se mobiliser, écouter les membres de son équipe, et répondre rapidement aux situations de violence. Ignorer ces problématiques ou minimiser leur impact revient non seulement à fragiliser les intervenants, mais aussi à mettre en péril la sécurité et l’apprentissage des élèves.
Le bien-être du personnel n’est pas un luxe, c’est une nécessité. Une direction proactive peut faire toute la différence : instaurer des protocoles d’intervention clairs, demander des ressources additionnelles, impliquer les services spécialisés comme les psychoéducateurs ou les équipes TSA, et surtout, soutenir les enseignants et éducateurs dans leur quotidien.
Trop souvent, le sentiment d’abandon ressenti par le personnel découle d’un manque de reconnaissance et d’écoute. Il est crucial que la direction prenne en compte les appels à l’aide et agisse en conséquence. Offrir une formation sur la gestion des comportements, garantir des moments de concertation pour planifier des stratégies efficaces, et s’assurer que chaque membre de l’équipe a les ressources nécessaires ne sont pas des gestes optionnels : ce sont des obligations.
La clé du changement : Une équipe unie et soutenue
Il est temps de bâtir des ponts entre tous les acteurs de l’éducation. Une direction qui se tient aux côtés de ses enseignants et éducateurs, qui comprend leurs défis et qui agit en conséquence, envoie un message fort : “Vous n’êtes pas seuls.”
C’est ensemble, en brisant le silence, en reconnaissant les limites de chacun et en réclamant des solutions concrètes, que nous pouvons espérer changer les choses. Le bien-être de nos élèves passe par celui des intervenants qui les accompagnent au quotidien. Si nous voulons que nos jeunes s’épanouissent, il faut d’abord que les adultes qui les soutiennent puissent travailler dans un environnement sécuritaire et respectueux.
Conclusion : Une responsabilité partagée
La violence en milieu scolaire est une problématique complexe qui ne peut être ignorée. Chaque acteur a un rôle à jouer, mais la direction porte une part essentielle de cette responsabilité. Elle doit être le pilier sur lequel s’appuie son personnel, en garantissant des mesures de soutien, en assurant la sécurité de tous, et en veillant au bien-être de son équipe.
Ensemble, nous pouvons bâtir un milieu scolaire plus humain, où les élèves reçoivent le soutien dont ils ont besoin et où le personnel éducatif peut s’épanouir dans son rôle. Cela commence par écouter, agir et protéger. À tous ceux qui vivent ces défis quotidiennement : n’oubliez pas que votre travail est précieux, mais votre bien-être l’est tout autant. Nous sommes tous dans cette lutte ensemble, et c’est ensemble que nous trouverons des solutions.
Qu’en pensez-vous? Quelles seraient vos solutions?